Sextape/Chantage financier : «Soit tu paies, soit je diffuse»
Nombre de personnes depuis les années 2000, ont vu leur sextape dévoilée et largement diffusée sur Internet malgré une opposition plus ou moins virulentes à leur diffusion. La mise en ligne présumée ou avérée de ces vidéos n’est seulement un acte de revanche au non de la séparation, mais aussi souvent, un moyen efficace pour escroquer.
Dame Nadège a été victime d’un chantage financier de la part d’un homme rencontré sur Internet. Celui-ci feignant d’être amoureux, lui avait demandé de dévêtir devant une webcam. Il s’est ensuite servi de ces vidéos comme un moyen de pression. «Je n’aurais jamais imaginé qu’il en vienne là. On s’est connu sur les réseaux sociaux et on a décidé de sortir ensemble. Mes nombreuses tentatives de le rencontrer ont été vaines. Il me proposait avec insistance une relation sexuelle à distance. Après plusieurs refus j’ai cédé.», confie Nadège. Et voila sa plus grosse erreur. « Quelques minutes après, il m’a renvoyé ma vidéo nue et me menaça de diffuser si je ne lui envoie pas 200.000 F CFA. «Soit tu paies, soit je diffuse sur les réseaux», me menace-t-il.
Tout comme Nadège, plusieurs en ont fait les frais et tombent facilement dans les mailles de ces individus sans foi ni loi. Le but premier étant de soutirer de l’argent chez leurs victimes, ils y mettent tous les moyens qu’il faut. Leurs cibles sont pour la plupart des autorités, des personnalités, des hommes de confession.
S’agit-il de réseaux organisés ?
Ces escroqueries à l’amour sont effectivement organisées, mais il s’agit de petits groupes d’escrocs au niveau local. À l’ANSSI, des plaintes pleuvent au quotidien. Selon Médégan Fagla, directeur général de l’Agence nationale pour la sécurité des systèmes d’information : « Ils font cela pour gagner de l’argent. Il ne s’agit absolument pas de grands groupes criminels qui se coordonneraient avec tout un tas d’opératrices derrières des écrans. C’est beaucoup plus rustique que cela. Ils sévissent vraisemblablement depuis des cybercafés dans des grandes villes, ce qui ne simplifie pas la tâche des policiers pour les identifier, car il utilisent des outils relativement compliqués. », confie-t-il. Au nombre de ces outils, on peut citer l’application Bandicam pour les ordinateurs et DU Recorder pour les smartphones.
L’application Bandicam téléchargeable gratuitement sur Internet, que les auteurs de la vidéo utilisent souvent pour commettre leur forfait.
Le déroulement probable de la scène.
En clair, l’auteur ou les auteurs de la vidéo, dans l’optique de piéger leur victimes ont d’abord installé le logiciel Bandicam (téléchargeable gratuitement sur Internet) sur leur ordinateur. Ensuite, ils initient un appel vidéo avec une personnalité en se servant d’une femme. C’est donc au cours de cette conversation vidéo que tout se passe.
Selon le portail informatique Commentcamarche.net, Bandicam est un outil de surveillance très puissant et très performant. Il peut enregistrer toutes les actions qui s’affichent sur l’écran que ce soit un programme lancé, une vidéo en cours, un jeu que vous jouez, une musique que vous écoutez, ou autres. Il est essentiel de savoir que les enregistrements se font de manière automatique, c’est-à-dire que le logiciel n’a pas besoin de l’utilisateur pour enregistrer les actions sur l’écran. Mieux, les vidéos capturées sont sauvegardées dans votre disque dur au format MPEG ou AVI.
Ainsi, il vous est possible de lire ces vidéos avec n’importe quel lecteur. Ce logiciel est tellement efficace qu’en plus des enregistrements vidéo, il peut aussi réaliser des captures d’écran sur une vidéo ou sur un jeu vidéo. Une fois l’enregistrement terminée, il ne vous reste plus qu’à effectuer les captures. On peut dire que ce logiciel est très pratique puisqu’il est capable d’enregistrer toutes les activités bénéficiant de la technologie DirectX et Open GL.
En plus, il est livré avec une interface simple à comprendre qui facilite sa manipulation. Le meilleur ou le pire selon chacun, est qu’il est en téléchargement libre sur Internet et donc à la portée de tous.
Que doit-on faire si on se trouve pris dans ce type d’engrenage à la suite d’une rencontre virtuelle ?
La première chose à faire est de surmonter sa honte en essayant d’en parler à des amis ou des confidents. «l faut relativiser, se dire que ce n’est pas catastrophique, vous ne serez pas la risée du monde entier. Juste des personnes qui essaient de vous escroquer. La deuxième chose à faire est de récolter le maximum d’éléments techniques qui pourront être utiles à l’enquête. Les pseudonymes des escrocs ne suffisent pas. Il faut imprimer tous les courriers électroniques avec leurs entêtes, récupérer les adresses IP, garder les SMS, etc….
Il est également important de porter plainte. Les enquêteurs pourront aider la victime à rassembler les éléments en question.
Par ailleurs, si on n’a pas encore payé par Western Union ou autre, malgré les menaces ou la diffusion de vidéos, il ne faut surtout pas le faire. Cela n’a aucun sens. D’ailleurs Western Union explique très bien sur son site que: « Ses services ne doivent être utilisés que pour payer des gens que l’on connaît vraiment, physiquement.», explique le DG ANSSI.
Comment se prémunir de ce type de mésaventure, quels sont les pièges “basiques” à éviter ?
Il est compliqué de répondre à cette question, car on ne peut pas être contre le fait que des gens puissent se rencontrer par Internet. « Si une personne est prête à s’exhiber sur Internet, elle prend le risque que la personne en face l’enregistre et réutilise les images. Si la personne décide de prendre ce risque et se fait menacer par la suite, il faut qu’elle sache qu’elle n’a rien fait de mal puisqu’il s’agit de discussions entre adultes avec qui on a eu des échanges sexuels parfaitement consentis. Il ne faut donc pas avoir honte, ne pas payer et déposer plainte.».
Emeric C. OKOUPELI