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Nigéria: avant les urnes, il faut le cash et le carburant

Le manque de billets et la rareté du carburant mettent les Nigérians à genoux à quelques heures de choisir leur prochain président.

« Je suis là depuis 5 h du matin. Je viens remplacer mon frère qui a dormi sur les lieux. Il faut occuper une place de choix pour avoir une chance de faire le retrait…», dit Samiou dont le visage fait transparaître quelques gouttes de sueur à cette heure de la journée à quelques minutes de l’ouverture de la banque. Nous sommes non loin du stade « Teslim Balogun » à Surulere à Lagos.

Toujours dans les environs, la station-service offre le même décor. « J’ai passé la nuit dans mon véhicule pour trouver de carburant…», déclare Mufa, un automobiliste dans un rang interminable.

Au Nigéria, il n’y a pas le cash, l’argent frais manque cruellement depuis cette décision de la Banque centrale de retirer les vieux billets de Naira et de les remplacer. C’est le même scénario dans les stations-services où l’essence est rare dans ce pays à peine évincé de la 1ère puissance pétrolière d’Afrique par l’Angola.

CALVAIRE AVANT VOTE

Cette situation a dégénéré plus d’une fois déjà aussi bien à Abuja que dans les autres villes du Nigeria devant les banques, les guichets automatiques et les stations-service. Comment allez voter dans cette situation chaotique quand il n’y a pas le cash pour prendre le carburant pour voter ?

Le président Buhari qui a pris cette décision de changement de billet en catimini avec le directeur de la Banque centrale sans consulter le ministre des Finances, a tenté une sortie de crise.

En effet, il a fait une adresse le vendredi 17 février dernier à la télévision publique. Il a annoncé le retour des billets de 200 Naira, une manière de calmer la grogne sociale.

Dans cette adresse, il a ordonné le retour des vieux billets de 200 Naira qui seront en vigueur jusqu’au 10 avril prochain. Le président Buhari a invité les banques à ressortir les vieux billets de 200 Naira déjà rangés dans les soutes.

Il a également demandé aux responsables des banques, le bras technique de ce processus de retrait des billets de 200, 500 et 1000 Naira sous la coupole de la Banque centrale du Nigéria de contribuer à l’exécution diligente de cette décision.

Par cette énième décision, le président nigérian veut-il redorer son blason terni avant de partir? En effet, le maître d’Abuja sait qu’il a une grande part de responsabilité dans la situation actuelle.

C’est lui qui a donné carte blanche à la Banque centrale de mener cette réforme sans en maitriser les contours. En son temps, le président n’en avait que cure du son de cloche de spécialistes bancaires et financiers qui lui demandaient d’y renoncer pour éviter des situations dommageables.

La suite on l’a connait. Face à l’épreuve des faits, le président Buhari tente de trouver une solution à la contestation générale qui tourne par endroit à l’émeute au Nigeria quand les gens n’arrivent pas à échanger les anciens contre de nouveaux billets.

Le président Buhari constate que la grogne générale qui gagne du terrain dans son pays n’est plus un ballon de baudruche.

On attend de voir lors du scrutin du 25 février 2023, les effets de cette annonce de retour provisoire aux vieux billets quand on sait que 37 % du corps électoral se déplace vers sa ville familiale pour voter.

Abiath SANUSSI (Lagos correspondance particulière)

Site www.lafriqueenmarche.info du 24 février 2023 No 361

Bénédicte DEGBEY

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