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Mali/Fin Barkhane : Près de 50 morts en huit ans, 600 millions d’euros chaque année. 

Mali/Fin Barkhane : Près de 50 morts en huit ans, 600 millions d’euros chaque année. 

Que retenir en terme de bilan de ‘’Barkhane’’ sur le plan humain et financier ?

Près de 50 militaires français sont morts au Mali depuis 2013, année du début de ‘’Serval’’ jusqu’à ‘’Barkhane’’. 

 Mieux, la France consent chaque année 600 millions d’Euros comme budget consacré à cette opération. 

Sur le plan humain, ce bilan de près de 50 morts est dû aux velléités des groupes djahadistes. Ces derniers au début désabusés par l’attirail et l’armada de l’armée française ont changé de stratégie. 

Les djihadistes qui ont été mieux ‘’carapacés’’ et formés lors de différents cursus d’attaques sont devenus plus agressifs et plus aguerris. 

D’où des actions terroristes d’envergure contre les militaires français. La pause des mines et autres explosifs est devenue régulière. Cette montée en puissance découle de l’entrée en scène des artificiers chevronnés qui ont fait leurs armes en Afghanistan, en Syrie, lors de la guerre civile en Algérie et en Libye. 

Finances, on fixe le tableau de bord. 

Le budget de 600 millions d’Euros prend en compte l’intendance, la solde de la troupe, l’entretien du matériel terrestre (chars et autres appareils) et aérien (les avions et autres drones).

Sans oublier les renseignements. Les sources précisent aussi la prise en charge sanitaire des blessés et la prise en compte des évacuations sanitaires. 

A Paris, les sources autorisées parlent même de l’augmentation des crédits du programme au profit des opérations extérieures (Opex). 

Dans un contexte de pandémie et d’austérité budgétaire, il était nécessaire de trouver des dizaines de millions d’euros supplémentaires pour financer les surcoûts liés aux opérations extérieures. Ce qui passe par la poursuite du resoclage budgétaire pour éviter des surcoûts des Opex. L’une des causes de l’augmentation des crédits du programme découlerait de l’imputation des crédits dédiés aux (Opex).

Un collectif budgétaire au niveau de crédits prévus était impérieux pour éviter que cette opération se retrouve sans moyens financiers. Sans cela, les autres années, il y aura encore des mises en réserve et un douloureux débat sur la fin d’exécution budgétaire pour les Opex. 

Il fallait donc mettre un terme à Barkhane pour éviter une augmentation du budget de ladite mission. Or, si le budget du programme augmente, le poids relatif des Opex passera de 5 à 7 % des crédits. Les crédits dédiés aux Opex augmenteront de 48 % contre 9 % pour l’ensemble du programme.

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Les financiers de l’Elysée ont donc prévenu Emmanuel Macron. Il revenait au président français d’être très attentif à l’augmentation des crédits Opex qui pourraient atteindre 1,1 milliard d’euros dès 2022 sans oublier ses répercussions sur l’équilibre du programme.

Par Firmin TEKLY, correspondant en France.

Macron, la pression des Français?

Le president français a-t-il craint la reaction de ses compatriots dans les urnes lors de la présidentielle de 2022 ? 

 Cela est bien possible.   

Emmanuel Macron après le rythme des sept dernières années avec “Serval’’ puis “Barkhane’’ a décidé d’y mettre un terme.   

Couper l’herbe sous les pieds de l’extrême droite.

Si le président Macron change de vision, son opinion populaire à un an de la présidentielle de 2022 en est pour beaucoup. L’opinion française a commencé par fustigier les investissements très coûteuses dans cette région du Sahel. 

Le president Macron a donc tenu à changer de stratégie pour ne pas être sanctionné par les Français qui commencent par adherer à la these de l’extreme droite en France. 

A la question de savoir si parce que les Français étaient hostiles à cette présence Emmanuel Macron s’est désengagé partiellement du Sahel? Il est clair que les enjeux de politique intérieure (présidentielle dans un an en France) pourraient dicter un petit peu le timing.  

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En outre, il faut souligner que l’opinion française n’a cessé de critiquer la double illusion, car les choses ne s’améliorent pas pas au Mali, mais elles se dégradent d’année en année.

Par Firmin TEKLY, correspondant à Paris. 

La Russie va-t-elle poser ses valises à Bamako? 

Suite au départ de la Barkhane, tous les observateurs avertis se demandent si la Russie ne va-t-elle s’installer au Mali? Le fameux et puissant groupe Wagner ne serait plus loin. 

La nature a horreur du vide, dit ladage. Après, le depart de Barkhane annonce par Emmanuel Macron, il ny aurait pas pour autant dinquiétudes à Bamako pour combler le vide. Les cables diplomatiques suivent les traces de la Russie.

Pour cet atterrissage, le fameux et puissant groupe Wagner qui ne serait plus loin aurait un role important à jouer. Au regard de ses prouesses comme on le voit actuellement en Centrafrique, elle pourrait proprement faire le travail au Mali. 

Moscou, les pions vers Bamako? 

Il ny a pas de doutes. Avec la prise de pouvoir de Assimi Goïta et le retrait de la force armée française (Barkhane), la Russie doit en profiter. Surtout que le Mali et la Russie était déjà liées par le biais des accords de coopération militaire. 

Mieux, les patrons de la junte qui tiennent les rênes du Mali depuis août 2020 sont des diplomés de plusieurs écoles et instituts militaires de la Russie. Il y a donc une proximité intellectuelle entre les actuelles autorités politiques militaires du Mali et la Russie. 

Au regard de la situation politique et sécuritaire actuelle du Mali surtout après le retrait de la France, il pourrait y avoir un resserrement de liens entre les autorités de Moscou et celles de Bamako, le boulevard est donc dégagé pour la Russie qui peut avancer ses pions à Bamako. Les fins connaisseurs de léchiquier russe savent de quoi ils parlent.

Par Murielle MENSAH, correspondante aux USA.

Macron accuse les Etats du G5 et critique la CEDEAO.  

Les Etats du G 5 Sahel et ceux de la CEDEAO ont eu des traitements critiques de la part de Emmanuel Macron. Que reproche-t-il aux présidents africains ? 

En annonçant sa decision de mettre un terme à lopération Barkhane, Emmanuel Macron a accusé les Etats du G 5 Sahel. Dans le même temps, il a réglé ses comptes avec la CEDEAO qui en août 2020 a sanctionné mes patrons de la junte et qui après le deuxième coup dEtat du 24 mai 2021, ont adoubé les acteurs de la junte.  

Si ça n’a pas fonctionné, c’est parce que les États sahéliens ne savent pas jouer leur role a dit urbi Emmanuel Macron. Sans coup férir, le president Français accuse les présidents du G5 pour leur incapacité à occuper le terrain après le travail de l’armée française.  

Pour cela, le locataire de l’Elysée a décidé de la fin de l’opération militaire Barkhane et donc la fin de bases de l’armée française dans le G5.

Emmanuel Macron na pas été tendre avec la CEDEAO. Linstitution ouest africaine a été inconstante de lavis de Macron. Pour le locataire de lElysée, on ne peut condemner la junte en 2020 et cautioner neuf mois après son decond coup dEtat. 

Bamako août 2020, Bamako mai 2021.

La CEDEAO par le biais de ses chefs d’État et de gouvernement a suspendu le Mali de ses institutions communes en réponse au premier coup d’État militaire.

Cependant, après le second coup, la CEDEAO a décidé lors d’un sommet régional extraordinaire au Ghana le dimanche 30 mai de suspendre le Mali, mais entérine le statut de chef d’Etat de Assimi Goïta. Emmanuel Macron n’est pas restée silencieuse face aux événements au Mali et n’a pas été donc tendre avec la CEDEAO.

Et d’une manière ou d’une autre, la CEDEAO n’a pas donné une lisibilité claire de sa vision au Mali entre août 2020 et Mai 2021. Après le premier coup d’Etat de Goïta, il y a eu un véhément réquisitoire de la part de certains ténors de l’institution, farouchement opposés au coup d’Etat. Il s’agit de Alassane Ouattara et Alpha Condé. Leur position radicale contre le coup d’Etat était mue par leur crainte d’avoir une contagion quand on sait que chacun de ces deux chefs d’Etat voulait s’octroyer un 3 ème mandat illégal.

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Rappelons que le coup de la junte à Bamako était intervenu ( août 2020) donc à quelques décades de la présidentielle en Côte d’Ivoire et en Guinée. Au-delà des sanctions politiques, ils ont corsé l’addition avec un blocus financier et économique du Mali. Au finish, la junte malienne a cédé. Assimi Goïta a revu ses ambitions à la baisse et a accepté le poste de vice-président de la Transition.

Et Macron se fâcha

Mais contre toute attente, ces deux présidents ont gardé le silence quand le second coup a eu lieu en mai 2021. Assimi Goïta en fin stratège a su jouer en tenant compte des calculs d’apothicaire de Ouattara et Alpha. Mieux, certains présidents de la région comme Faure Gnassingbé, « le jeune doyen de la CEDEAO » comme on l’appelle affectueusement dans les couloirs de l’institution sous régionale a pesé de tout son poids pour qu’en dehors de la suspension politique du Mali, qu’on la CEDEAO accompagne la transition malienne.

Cette vision de la CEDEAO n’a pas été du goût du président Macron qui s’attendait à des représailles contre le colonel Goïta et ses caudataires de l’armée. Rien n’y fit à Accra. Il ne peut en être autrement, lui qui a fragilisé les principes démocratiques au Tchad en adoubant le fils de feu Idriss Déby.  

Désabusé par rapport au nouveau putsch militaire de Bamako, il a décidé de sanctionner le Mali. Après ses menaces dans le journal JDD, il est donc passé à l’acte après avoir critiqué de manière véhémente les Etats du G 5 Sahel et ceux de la CEDEAO, il a tranché dans le vif.

Par Blanchard LAWSON, correspond au Sénégal.

Défaite ou non de la France? 

La France n’a pas perdu la bataille contre les djihadistes, mais elle se reorganise. 

Macron a annoncé le 10 juin qu’il veut transformer en profondeur la présence militaire française au Sahel. Emmanuel Macron s’est désengagé partiellement et non définivement du Sahel. 

Il a profité un peu du désordre politique à Bamako, pour avancer, concrétiser une reconfiguration de lintervention française au Sahel. La France ne sest pas retiree, mais elle se réorganise pour revenir en force près du G5 même si cela va prendre du temps. 

Par Luc GUIDIBI, correspond en Afrique du Sud.

Après linterview dans le JDD : Macron passe à l’acte. 

Au terme dune tournée en Afrique (Rwanda et Afrique du Sud), Emmanuel Macron a accordé un entretien au Journal du dimanche (JDD). Il avait menacé de retirer « Barkhane ». Ce n’était pas des paroles en l’air.

Emmanuel Macron n’a donc pas digéré le deuxième coup dEtat du colonel Goïta. Il donc affirmé dans cet entretien qu’il ne restera pas aux côtés dun pays où il ny a plus de légitimité démocratique, ni de transition encore moins laisser ses soldats avec lislamisme radical au Mali. Macron est donc passé à l’acte deux semaines après son interview dans le JDD 

Emmanuel Macron était très sérieux. Le président français a donc signé l’acte de décès de Barkhane en tant qu’opération extérieure. Barkhane a été lancée en 2014 après l’opération Serval qui avait permis de stopper l’avancée jihadiste. 

L’intervention française sera transformée et passera par la fermeture de bases de l’armée française. En entendant que les détails du retrait français soient connues c’est la fin de la présence des troupes françaises au Sahel. 

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La priorité de Macron est la lutte contre les jihadistes par les forces spéciales. Pour cela, la force Sabre, de 350 commandos des trois armées, chargés de neutraliser les chefs terroristes est épaulée par les commandos européens de la force Takuba déjà présents au Sahel.

Par Alain GBEGAN, correspondant au Nigeria.

 Sentiment anti-français en cause?

Le départ de « Barkhane » annoncée par Emmanuel Macron est-il lié ai sentiment anti-français au Mali?

Le sentiment anti-français au Sahel est une réalité au Mali depuis ces trois dernières années. Sur les réseaux sociaux, la France est vouée aux gémonies, insultée et trainee dans la boue. La France est souvent accusée dêtre la marraine des terroristes.

Clichés contre la France?

 Ce sentiment anti-français découle de la montée en puissance des groupes terroristes qui attaquent régulièrement les troupes réguliennes maliennes avec à chaque fois des centaines de morts.

Sur les réseaix sociaux, on se demande comment avec cet attirail, cette armada et toute la technologie de Barkhane, la montée en puissance des terroristes est-elle possible ? 

En décidant de retirer « Barkhane », Emmanuel Macron tente de sortir du quotidien le « piège de Barkhane ». Il se fait que cette operation militaire française est une guerre sans fin, sans défaite ni victoire, qui épuise les crédits militaires et les soldats français.

Par Frédéric TOURÉ correspondant en Côte d’Ivoire.

Bamako, désormais seul face aux djihadistes?

La France laissera t’elle les djihadistes marcher sur Bamako? 

La décision de la France de faire partir la Barkhane est peut être une opportunité pour les djihadistes. Ceux-ci vont-ils en profiter pour s’imposer définitivement dans le G5 ?  

Pour Jean-Hervé Jézéquel, spécialiste du Sahel à lInternational Crisis Group, interrogé par RFI, Macron et la France n’ont pas abandonné le Mali encore moins le G5. Cependant, elle réduit juste les effectifs français( une centaine sur 5000) dans la région.

Macron a précisé que la présence française au Sahel nest plus adaptée à la réalité des combats. Lidée est de former une alliance structurée autour de la force européenne Takouba, lancée en mars 2020 pour lutter contre le terrorisme et non plus de sécuriser de vastes zones.

La France ne laissera donc pas les djihadistes marcher sur Bamako. Au contraire elle restera la colonne vertébrale de cette force à laquelle seront associées dautres armées africaines et internationales.

Par Luc GUIDIBI, correspondant en Afrique du Sud.

Bouclier français : Au commencement était l’opération « Serval ». 

Des vagues de djihadistes déferlaient du nord du Mali vers Bamoko, la capitale. Il fallait mettre des digues pour les contenir. L’ opération Serval prit donc forme. 

Avant Barkhane au Mali, il y avait lopération Serval Elle a été lancée en janvier 2013 et menée dans le cadre de l’intervention militaire au Mali. Elle a pris fin en juillet 2014 et a laissé place à l’opération Barkhane. 

Serval avait donc pour objectif de soutenir les troupes maliennes cherchant à repousser les offensives des groupes armés islamistes. Ces groupes avaient pris le contrôle de l’Azawad, la partie nord du pays. 

Serval avait pour objectif darrêter l’avancée en direction de Bamako des forces djihadistes, sécuriser la capitale du Mali et permettre au pays de recouvrer son intégrité territorial. Objectifs fixés le 15 janvier par l’ex-président français, François Hollande.

Par Luc GUIDIBI, correspondant en Afrique du Sud.

Rectification de la Transition: Assimi Goïta, le coup dEtat de trop ?

Deux coups d’État en neuf mois, tel a été l’exploit du colonel Goïta. Son deuxième coup d’Etat est intervenu en mai dernier après le premier survenu en août 2020 qui a renversé le president Keïta. Si Emmanuel Macron a décidé de mettre un terme à l’opération Barkhane, Assimi Goïta n’est-t-il pas en partie responsable de ce qui arrive au Mali?

La goutte d’eau de trop est le nouveau coup de force du colonel Goïta qui a écarté MM. Bah NDaw et Ouane du pouvoir. Puis, il y a eu du rythme politique et surtout de l’action juridique avec la décision de la Cour constitutionnelle malienne de faire de vice-président de la transition, Assimi Goïta, alors chargé de la défense et de la sécurité, le maître de Bamako, le président de la transition en titre. 

Mieux, Emmanuel Macron n’apprécie pas la connivence qu’on observe au Mali avec les groupes terroristes après le coup d’État d’août 2020, qui a renversé Ibrahim Boubacar Keïta.

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Au nom de l’accord d’Alger censé apaiser les tensions entre Bamako et les mouvements indépendantistes touaregs, le locataire de l’Élysée ne voit pas dun bon oeil ce rapprochement. 

Emmanuel Macron n’a donc pas digéré ces évènements et a affirmé qu’il ne restera pas aux côtés d’un pays où il n’y a plus de légitimité démocratique, ni de transition encore moins laisser ses soldats avec l’islamisme radical au Mali. La suite, on la connait. 

Par Blanchard LAWSON, correspond au Sénégal.

Journal L’Afrique en Marche du 13 juin 2021.

Bénédicte DEGBEY

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