L'afrique en marche

L’Editorial de Titus FOLLY :  Djogbénou et le fleuve Mono, trois ans après.  

<< Le fleuve Mono s’offre à nous. Nous ne devons plus le craindre… ». Ainsi s’exprimait Joseph Djogbénou lors du séminaire sur le devenir du fleuve Mono en 2018. Cette rencontre a été organisée par les ressortissants de la commune d’Athiémé et par le réseau ‘’Midedji’’. Trois ans après cette déclaration, et actuellement où le fleuve Mono en crue est encore dangereusement de son lit, que retenir du bilan du régime de la ‘’ Rupture’’ par rapport à ce fleuve ? Dans l’exercice de l’éditorial du jour, analysons sous toutes les coutures la problématique fleuve Mono et ‘’Rupture’’.   

En faisant cette déclaration, Joseph Djogbénou n’a pas fait une dangereuse sortie de route à polémiques dont lui seul a les secrets. Pour une fois, ce n’est ni une déclaration relative au certificat de conformité. Cette déclaration n’est ni un cas matériel de la ‘’ruse’’ et de la ‘’rage’’, deux expressions du patrimoine lexical de Joseph Djogbénou. 

Depuis lors, on a vu la ‘’ruse’’ comme l’élément lexical appartenant à un inventaire politique ouvert. Quant à la ‘’rage’’, elle a été un morphème lexical qui a marqué au fer rouge le Bénin depuis 2016. Dans les deux cas, les choses continuent de se passer conformément aux vœux de Joseph Djogbénou.

Mais lors de ce séminaire, l’avocat de Patrice Talon et érudit en procédures a ‘’imprimé’’ un bulletin d’informations. Il met en exergue l’état des lieux en ce qui concerne les paysages traversés par le fleuve Mono. Ce fleuve qui emporte sur son chemin depuis des décades, greniers et cases.

Djogbénou propose qu’on change le destin du Mono. A-t-il raison ?

Pour Joseph Djogbénou, intervenant lors de cette rencontre, le fleuve Mono est une solution qu’il faut réussir à installer dans les perspectives pour en faire un atout de développement au lieu d’être un fleuve si redouté. A-t-il raison ?

Sans ambiguïté, Joseph Djogbénou a raison. Il faut revaloriser le profil physique, mental, moral et socioéconomique du fleuve Mono. Ce dernier, depuis des décennies, sur son itinéraire en période de crue, a souvent atteint un étiage qui ne sème que désolation.

Quand le fleuve Mono déferle avec fureur, il est une menace pour l’économie de trois départements (surtout le Mono et le Couffo, sans oublier ses escapades dans le Zou). Alors que dans cette partie du Bénin, ce fleuve quand il n’est pas en crue renforce les potentialités agricoles avec les limons noirs de Dédékpoé, Ahoho…) sans oublier ses produits halieutiques.

Quand il est en crue, il est aussi un handicap pour le système scolaire et pour les centres de santé. Il est également un danger pour la villégiature des touristes dans les périmètres culturels alors qu’il offre des attraits touristiques comme les chutes du Mono. Il soumet l’environnement même si on profite de ses capacités énergétiques grâce au barrage de Nangbéto.

Joseph Djogbénou qui n’est pas originaire de ce département du Mono a vu juste, lui le ressortissant du plateau d’Abomey. Il faut donc dompter ce fleuve qui attriste le visage des dizaines de milliers de femmes béninoises, contraintes d’abandonner leurs activités. Il faut endiguer la fureur de ce fleuve qui convoie chaque année, des hommes dans les écoles et autres infrastructures sociocommunautaires transformées en camps de réfugiés.

Au moins Djogbénou a dit ce qu’il pense du fleuve Mono contrairement aux autres comme Bruno Amoussou, le leader éternel du Grand Mono (aujourd’hui Couffo et Mono), qui malgré ses multiples positions politiques n’a jamais pu lever le petit pouce devant le fleuve Mono depuis l’avènement de la ‘’Rupture’’.   

Mais à l’heure des choix où on doit faire du Mono, un atout de développement au lieu d’être un fleuve si redouté, n’a-t-il pas été oublié ?

Malheureusement, doit-on comprendre que ce séminaire relevait de l’intrigant mélange auquel se livrent les ‘’acharnés sériels’’ du pouvoir actuel du ‘’Bénin révélé’’ depuis 2016 ? Comment comprendre qu’à la première occasion où le régime Talon avait l’occasion de poser un acte fort par rapport au fleuve Mono que ce dernier soit royalement ignoré ?

En effet, le 15 avril 2020 le conseil des ministres a abordé le dossier de dragage de certains cours d’eaux du Bénin dans la partie méridionale de notre pays. Voici un extrait du communiqué qui a sanctionné le conclave gouvernemental. « L’Etat va assainir, réhabiliter, et draguer les lacs Ahémé, Nokoué, la lagune de Porto-Novo et leurs chenaux ». Il n’y a pas trace du fleuve Mono. Les Béninois ont donc tout compris. 

L’avenir du fleuve Mono lors de ce séminaire qui s’est tenu à la veille des législatives de 2019 n’était pas départi d’un enchevêtrement de l’instinct politique. Entre Athiémé, Grand-Popo, le Mono et Sébastien Ajavon (le redoutable opposant à Patrice Talon, le patron de Djogbénou), il fallait couper à jamais le cordon ombilical. Apparemment, ils ont réussi. Ils sont désormais maitres des lieux, mais le fleuve Mono n’était pas donc leur priorité.

Journal L’Afrique en Marche du mercredi 14 juillet 2021

Bénédicte DEGBEY

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