L’éditorial de Titus FOLLY : A Paris, procès d’un régime
« 400 opposants en prison… », telle est la substance du rapport détaillé par cinq organisations très sérieuses de défense des droits humains (dont quatre sont en France). Ce chiffre colossal a fait couler de grosses gouttes de sueur le long de la moelle épinière de plus d’un Béninois. Pourquoi Patrice Talon a-t-il fait le choix d’arrêter 400 opposants ? Analyse dans l’exercice de l’éditorial du jour.
On a connu Yoweri Museveni en Ouganda. Il est au pouvoir depuis 1986. Il fait tout pour conserver les rênes de l’Etat, mais jamais, il n’a raflé d’un seul coup plus de 400 opposants. Mieux, il n’a jamais pensé éliminer les partis d’opposition pour aller seul aux élections. Il laisse les opposants se présenter, puis il négocie ses calculs d’apothicaire à la Cour suprême. Ce que les plus grands satrapes d’Afrique n’ont pu faire, Patrice l’a réussi avec brio. Il a éliminé les opposants et pour asseoir son pouvoir au lendemain de sa victoire à la nord-coréenne, il a raflé 400 opposants.
Arrêter 400 opposants pour…?
Pour Patrice Talon, la crainte de tout perdre aussi bien le pouvoir (très fort qu’il incarne) de même que de voir la fin programmée des réformes qui déferlent sur le Bénin avec extravagance et placements peuvent expliquer son choix, celui de mettre à l’ombre 400 opposants.
Concernant les réformes, Patrice Talon y tient comme les prunelles de ses yeux. Au nom de ces réformes, il s’est fait qu’au soir du 28 avril 2019, les montagnes et les collines ont éclaté d’allégresse devant nous et ont battu des mains quand l’opposition a été exclue. Et pour mémoire, après les événements de Cadjèhoun, les 1er et 2 mai 2019, près d’une centaine de personnes avaient été arrêtées. Et pour ceux qui n’avaient pas compris la leçon de 2019, il fallait remettre le couvert en 2021.
Pour la présidentielle de 2021, au nom du parrainage, du code électoral, de la Constitution révisée, des épines se sont élevées, les cyprès aussi. La cohorte de présidentiables des scrutins passés ( 1991,1996, 2001… jusqu’à 2016 ), est à jamais révolue. Et sans coup férir, tout a été mis en branle pour ‘’couler’’ l’ancienne expression démocratique du Bénin depuis le renouveau démocratique. Alors, la solution pour Patrice Talon est de ne plus jamais avoir plus de trois à cinq candidats à une Présidentielle. Pour le chantre de la « Rupture », 2021 doit consacrer la fin de la pagaille et de la ‘’défausse démocratique’’.
Au-delà des réformes, pour Patrice Talon, 2021 était également une question personnelle de survie politique. D’où l’instinct de conservation du pouvoir. Ce qui est normal ce qui est humain. De ce fait, mettre à l’ombre les ténors de l’opposition découlait d’un manifeste bien planifié.
En outre, Patrice Talon veut empêcher à tout prix la charge de la revanche de la part de l’ancienne classe politique nostalgique et revancharde. Au nom de son pouvoir identifié, immaculé, idéalisé même s’il est au mauvais côté de l’histoire, Patrice Talon ne pouvait permettre l’accomplissement du rêve des opposants. Et même dans le dos du chef, on a enregistré des dérives riches et gratuites émanant de bandes de « désespérés ».
Dès lors, le retrait de la circulation des tiers-intervenants (400 opposants) pour les geôles de la ‘’Rupture’’ est un pari vite gagné. Dès lors, la passion de certains vers des issues quasi-suicidaires pour garder au frais 400 opposants n’est donc pas une surprise.
Pour Patrice Talon, au nom du pouvoir, rien n’est impossible. Les opposants n’avaient pas compris cette logique. Ils l’ont appris à leurs dépens.
La vie est belle. Et chaque jour est une vie. Prenons-là du bon côté et demain, il fera beau sur la grande route.
Journal L’Afrique en Marche du jeudi 03 juin 2021.