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Bénin/Vie chère : Le PCB à l’opposé de la « Rupture »

Bénin/Vie chère : Le PCB à l’opposé de la « Rupture »
Dans une déclaration en date du 07 avril 2022 publiée par le Parti communiste du Bénin, cette écurie politique ne partage pas la grille de lecture du pouvoir de la « Rupture » au sujet de la fin et de la vie chère au Bénin. Lire ci-dessous l’intégralité de ladite déclaration.
*NI LA COVID-19, NI LA GUERRE EN UKRAINE, NI LES PAYS VOISINS NE SONT RESPONSABLES,*
*C’EST LE POUVOIR DE TALON QUI A PLANIFIE ET CREE LA FAIM POUR LE PEUPLE.*
Face aux protestations qui s’amplifient dans les couches populaires et à la résistance des commerçants à appliquer les mesures incongrues du gouvernement contre la vie chère, le pouvoir de Talon a lancé ses grands dignitaires dans une guerre de communication pour se disculper de toute responsabilité. Ainsi on aura eu droit le dimanche 03 avril dernier à des émissions organisées pour Louis Vlavonou, le président de l’Assemblée nationale sur E-télé et pour Romuald Wadagni, ministre d’Etat chargé de l’Economie et des Finances sur l’ORTB. Pour ces deux piliers du pouvoir de Talon, c’est la Covid-19 intervenu en 2020, et ensuite la guerre russo-ukrainienne en 2022 et enfin le terrorisme dans les pays du Sahel avec la baisse de la production agricole qu’il entraine qui sont responsables de la vie chère et de la faim au Bénin. Comme en mission commandée, tous avec le porte-parole du gouvernement récitent comme une leçon les mêmes rengaines : c’est la situation mondiale et les causes extérieures ; la politique de Talon n’est pas responsable.
Mais, pour tout observateur de la vie sociale, si la Covid-19 et la guerre en Ukraine ont eu des impacts importants dans des pays, il ressort clairement qu’au Bénin, c’est Talon qui a planifié et créé la faim et la vie chère, et ce méthodiquement depuis 2016. Et quelques éléments parmi tant d’autres suffisent à le montrer.
1- Dès son arrivée au pouvoir et à sa première sortie publique à Parakou le 15 novembre 2016, il annonce à la suite des grandes lignes de son programme de gouvernement, que le peuple doit se serrer la ceinture.
2- Le 30 novembre 2016, en conseil des ministres, Talon dissout toutes les structures d’Etat dans le secteur agricole, y compris l’ONASA (Office National d’Appui à la Sécurité Alimentaire). Désormais, il n’y a plus de structure de prévoyance d’Etat, constituant des stocks stratégiques pour intervenir en temps opportun afin d’atténuer les envolées des prix des produits alimentaires de base sur le marché.
3- Début janvier 2017, le pouvoir se lance dans la destruction des entreprises de survie des petits vendeurs et vendeuses, des artisans des bords de rue et des marchés. L’opération de déguerpissement sauvage programmée pour les huit grandes villes du pays sera exécutée toute l’année dans presque toutes les villes et ceci sans aucune alternative, sans aucune mesure de compensation ni d’accompagnement de centaines de milliers de petites gens et leurs familles précipitées ainsi du jour au lendemain dans la misère et condamnées à la faim. Et ceci, aucun des griots du pouvoir n’ose jamais l’évoquer. Et pour cause : la destruction de la petite production sans création d’emplois, entraine toujours et irrémédiablement la faim et la détresse des petits producteurs ruinés.
4- En exécution de la politique de serrement de la ceinture au peuple, Talon, pendant qu’il a procédé à des augmentations des rémunérations des personnels politiques, s’est refusé à la moindre augmentation des revenus des salariés, tant du public que du privé. Pire, dans sa logique, il a procédé systématiquement à la précarisation générale de l’emploi salarié, public et privé et par conséquent, à la détérioration extrême des revenus. Voici ce que lui-même en dit à Berlin le 30 octobre 2018 devant les patrons des multinationales : « mon Gouvernement a, depuis avril 2016, mis en œuvre des réformes majeures…….Une nouvelle loi sur les conditions d’embauche dérégule désormais le recrutement et simplifie la rupture du contrat de travail. Aujourd’hui, les entreprises ont la possibilité de recruter sur contrat de travail à durée déterminée renouvelable quasi indéfiniment. Le montant des indemnités à payer en cas de licenciement est plafonné à neuf mois de salaire, quel que soit le motif du licenciement. Nous venons également de mettre en vigueur une réforme du droit de grève qui limite la durée totale des grèves à 02 jours maximum dans un même mois et à 10 jours maximum par an. » Le Président fait ainsi ouvertement la publicité des conditions esclavagistes faites aux salariés béninois. Voilà le « solide » que Talon a voulu et veut pour les travailleurs ! C’est ce sort, réfléchi, planifié et programmé qui est appliqué en particulier à des dizaines de milliers d’enseignants dits aspirants payés à des salaires dérisoires et 9 mois sur 12 et qui doivent, le ventre affamé, s’occuper de l’instruction des enfants du peuple.
5- Sur ces revenus dégradés, le pouvoir de Talon a opéré de façon systématique la multiplication et la hausse des taxes et impôts. Les tracasseries sur les opérateurs économiques se répercutent naturellement sur le coût de leurs prestations ou produits. Le 29 juin 2018, un arrêté du ministre des transports multiplie par deux les tarifs de pesage et de péage/pesage et ce, pour compter du 1er juillet 2018. Une taxe supplémentaire sur les transports ne peut qu’accroitre le coût à la vente des marchandises. Un mois plus tard, le 28 juillet 2018, il est décidé la hausse des tarifs de communication électronique. Malgré la reculade temporaire suite aux vives protestations des internautes, les prix des communications ont plus que doublé. La hausse se poursuit avec les taxes de 5% sur les transactions financières Mobile money. Les taxes prélevées sur les revenus des citoyens pour la délivrance de tous les actes administratifs ont été multipliées (taxe sur la grossesse) et augmentées. Le pouvoir vient d’opérer un abattement sur les salaires avec la suppression de l’abattement fiscal pour charge familiale, et a décidé des taxes sur tous les produits vivriers venant dans les marchés. Des millions de petits paysans subiront des ponctions sur leur maigre revenu de travail.
6- En plus des revenus du travail, le pouvoir s’est attaqué au patrimoine foncier des populations. La terre constitue un patrimoine de secours pour les paysans, un refuge pour les salariés et travailleurs indépendants. Le pouvoir de Talon a décidé l’expropriation sans dédommagement conséquent. Le cas de la zone économique spéciale de Glo-djigbé en est un exemple des plus illustratifs. En 2017, le dédommagement des populations pour l’expropriation de leurs domaines est fixé entre 75 frs et 2500 le m2, soit entre 37.500 frs et 1.250.000 une parcelle de 500 m2. Une véritable spoliation ! Où peut-on se reloger et se refaire la vie avec cela ? Et pourtant, les manifestants contre cette spoliation ont été réprimés 18 janvier 2018. Ailleurs, comme au quartier Fiyégnon Djako, des centaines de foyers ont été déguerpis sans ménagement, en septembre 2021, à une semaine de la rentrée scolaire, en pleine saison des pluies et sans accompagnement ; et le site est désormais planté de cocotiers !
7- Pendant que les revenus des populations sont systématiquement attaqués à la baisse, la politique agricole est orientée principalement sur le tout coton, dont la filière est privatisée et accaparée dès les premiers jours de son règne par Talon. Depuis lors, le ministère de l’agriculture est d’abord et avant tout, le ministère du coton. Le clan au pouvoir et ses soutiens du pacte colonial se glorifient chaque saison, des performances du coton au Bénin sur le plan régional et continental. Par contre, on n’entend jamais parler des performances et rang dans la production du maïs, du mil, de l’igname ou du manioc, produits de base de l’alimentation. Et pour cause, ces produits n’intéressent pas les hommes d’affaires au pouvoir, gérant du pacte colonial. Et par conséquent les producteurs ne bénéficient de presque pas de concours, technique, financier, de l’Etat.
Si l’on ajoute au peu d’intérêt effectif pour les cultures vivrières, l’absence totale d’une politique de prévoyance après la dissolution et la liquidation de l’ONASA, le pays est livré au risque accru d’insécurité alimentaire et de cherté de la vie en cette époque reconnue par tous de changement climatique.
*8- Au total, le pouvoir de Talon a programmé et mis en œuvre, depuis son arrivée au pouvoir, avant la Covid-19 et la guerre en Ukraine, la ruine et l’appauvrissement des masses populaires. Il ne peut convaincre personne qu’il n’est pas responsable de la faim et de la vie chère au Bénin. Le président Talon lui-même a dit qu’en toute chose, il ne pense qu’à lui-même ; qu’un président n’a pas besoin d’un bon bilan pour être réélu, mais plutôt de comment il tient ses concurrents et qu’enfin, en ce qui concerne les travailleurs, « vous en souffrirez, mais vous ne pouvez rien ». Toutes ses déclarations indiquent que le sort du peuple ne constitue pas le premier et principal souci du pouvoir.*
Aujourd’hui, c’est la crainte de la montée des protestations populaires dans un contexte international et sous-régional de révolution humaniste et patriotique qui fait sortir les griots et dignitaires du pouvoir dans la négation de leurs responsabilités. Le pouvoir affameur et pilleur mis à nu veut divertir et détourner l’attention du peuple vers une situation mondiale et les « commerçants véreux ».
Mais, c’est peine perdue. Le peuple qui a faim comprend qu’il ne peut avoir gain de cause qu’en poursuivant le combat contre la faim planifiée et entretenue par Talon, pour la suppression des taxes et impôts injustes, la reconstitution des structures de prévoyance sociale et la libération du pays du joug du pouvoir de la Rupture.
Cotonou, le 07 avril 2022
Le Parti Communiste du Bénin
Site www.lafriqueenmarche.info du 08 avril 2022 No 128
 

Bénédicte DEGBEY

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