Eugène Azatassou, vice-président du parti ‘’Les Démocrates’’ et l’un des rares à continuer par jouir de sa liberté s’est prononcé il y a quelques jours sur RFI. Il a projeté l’avenir politique du Bénin avec ce nouveau mandat de Patrice Talon.
Pour ce responsible politique de l’opposant, il y a lieu de reformer les lois de la ‘’Rupture’’ qui ont démontré leurs limites. Cependant, il a des doutes par rapport à cette perspective de réforme, car tout dépendra de Patrice Talon. De l’avis de Eugène Azatassou, il resort que l’urgence est là, mais Patrice Talon n’est pas le dirigeant qui écoute son peuple et respecte ses promesses. Pour cela, il ne croit pas à son discours d’investiture constellé d’engagements.
Des doutes, le discours d’investiture sans effet?
Le régime de Patrice Talon a excellé depuis 2019 dans une série de réformes politiques. Malheureusement, il se fait que ces réformes ont baigné dans un flot de sang et d’injustices. « Quelles sont ces réformes qui ont besoin de sang humain pour se mettre en œuvre ?», a souvent déploré le professeur Aïvo. Par cette formule que le constitutionnaliste avait souvent répondu à la logique de la courte vue des soutiens du régime actuel qui parlent de réformes qui marchent.
Au nombre de ces réformes, il y a la mise en œuvre du système partisan et de la nouvelle charte des partis politiques qui sont les clés de voute des réformes de Patrice Talon, réformes qui ont entraîné la disparition de nombreux partis politiques. Depuis ces fameuses réformes, ceux qui ont été élus doivent céder leurs places à ceux qui ont été rejetés sans oublier des partis politiques fermés comme l’on ferme des boutiques, et leurs responsables humiliés, a souvent déploré Joël Aïvo. Comme lui d’ailleurs, d’autres opposants ont toujours condamné le fait que le Bénin ait perdu son expertise légendaire pour organiser les élections.
Pendant le premier mandat de Patrice Talon, les affidés du régime ont toujours vanté les réformes économiques et politiques du chantre de la ‘’Rupture’’. Mais faisant le point sur RFI, Eugène Azatassou dit quand on voit les crises générées pour le Bénin depuis 2019, ces réformes sont négligeables face aux résultats obtenus.
Comme Azatassou, beaucoup d’opposants font maintenant et faisaient déjà allusion aux réformes qui ont engendé des morts lors des manifestations suite à l’exclusion de l’opposition des législatives de 2019 et de la présidentielle du 11 avril 2021.
Au nom de ces réformes, et se fondant sur des chiffres non confirmés par les autorités, au moins une dizaine de Béninois ont été tués (une première depuis le début de l’histoire politique du Bénin) par les forces armées béninoises à Cadjèhoun, Savè et Kilibo entre mai et juillet 2019. On a encore en mémoire le cas de Prudence Amoussou tuée le 2 mai 2019 à Cadjèhoun. Le même scenario s’est répété avec la dernière présidentielle du 11 avril 2021.
Les premiers dégâts de ces réformes ont commencé avec les législatives d’avril 2019 qui ont débouché sur une Assemblée nationale composée uniquement d’élus du Bloc républicain et de l’Union progressiste, les deux partis sous la supervision du chef de l’État. Une situation « unique au monde », et dont la conséquence est que le Parlement n’ose à aucun moment interpeler l’exécutif sur son action.
A ceux qui insinuent que cette configuration permet au chef de l’État de mettre en œuvre son programme de développement, le professeur Aivo leur répondait déjà que : « Le président de la République n’a pas besoin d’unanimité. Il n’a besoin que d’une majorité.».
L’instrumentalisation de la justice.
Il faut également déplorer l’instrumentalisation de la justice à des fins politiciennes. Les sorts réservés à Sébastien Ajavon (ici par la Criet), Atao Hinnouho (par les tribunaux ordinaires) et à tous les exilés politiques sont là comme des preuves tangibles de l’injustice. Pour ce nouveau mandat, il faut apaiser les tensions et rétablir la confiance, car c’est la confiance qui développe un pays, pas la peur.
Que faut-il faire durant ce nouveau mandat de Talon avec des réformes qui ont endeuillées des Béninois ? Que faut-il faire pour retrouver une gouvernance démocratique, patriotique et une probité dans la gestion du pays où les fruits de la croissance et du développement seront équitablement partagés se demandait déjà au professeur Aïvo.
A s’y méprendre, les mêmes causes ne produiront-elles pas les mêmes effets ?
Par Nourou TIDJANI
Journal L’Afrique en Marche du samedi 29 mai 2021.