Bénin/Justice : Aïvo jeté en prison

- Pourquoi le procureur Mètonou ne parle pas ?
- Les avocats du professeur toujours dans l’attente
Plus de dix jours après l’arrestation de l’opposant, Me Barnabé Gbago et ses confrères conseils de Joël Aïvo attendent toujours de connaître les raisons officielles de sa mise aux arrêts. Le procureur spécial qui a ordonné sa détention la nuit du vendredi 16 avril reste inhabituellement muet sur le dossier. Et voilà que le communiqué du secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken dans son communiqué en date du 23 avril dernier souhaite que les Béninois soient rapidement informés de l’avancement des dossiers de justice liés à l’incarcération des opposants.
Que reproche-t-on au juste à l’opposant Frédéric Joël Aïvo, et quels sont les éléments qui fondent son arrestation et son emprisonnement ? Plus de dix jours après l’arrestation et l’incarcération de l’opposant, de son mandataire financier Alain Gnonlonfoun et de deux autres personnes « présentées comme des militaires » (selon leurs avocats), il n’existe aucune réponse officielle à ces questions qui puissent éclairer la lanterne des avocats qui sont toujours dans l’attente.
Le parquet spécial a pourtant l’habitude de faire preuve d’une certaine célérité dans ce genre de dossier. Il a mis moins de 24 heures pour communiquer au public les éléments que la justice aurait contre la candidate des Démocrates, Reckyath Madougou.
Les avocats regrettent le deux poids deux mesures : célérité dans le cas Madougou et attente au sujet de Aïvo.
Ce silence sur le dossier Aïvo intrigue beaucoup l’opinion qui s’interroge. Serait-ce un moyen pour ne pas soulever des vagues et pousser l’opinion à passer à autre chose, ou au contraire traduit-il le malaise du parquet dans un dossier que les avocats annoncent vide ? « Nous ne savons pas encore dans quel sens vont évoluer les accusations portées contre Joël Aïvo, surtout qu’entre le jour où il a été appréhendé par la police et aujourd’hui, les chefs d’inculpation ont changé. », avait déclaré sur RFI Me Barnabé Gbago, l’un des avocats du professeur, au lendemain de son incarcération.
Arrêté de façon spectaculaire le jeudi 15 avril dernier non loin de Cotonou alors qu’il revenait de cours, le professeur de droit constitutionnel Joël Aïvo avait d’abord été accusé d’appel à manifestations insurrectionnelle et de complot contre l’autorité de l’État, selon ses proches. Il a été rejoint le lendemain matin par son mandataire financier Alain Gnonlonfoun, puis est apparu le chef d’inculpation de blanchiment de capitaux, toujours selon ses avocats qui précisent que les charges concernant l’appel à manifestations étaient tombées entre-temps.
Il faut préciser que deux autres personnes présentées comme des militaires sont également entre les liens de la détention selon les avocats.
En attendant, on est moins servi.
A part le directeur de la communication de la présidence de la République qui a parlé le jeudi dernier sur RFI, aucune autorité n’a encore commenté cette affaire. L’ancien journaliste Wilfried Léandre Houngbédji exerçait en effet un droit de réponse sur RFI suite aux dénonciations faites 48h plus tôt par Me Robert Dossou, ancien président de la Cour constitutionnelle et avocat de Joël Aïvo et de Reckya Madougou. « Être intellectuel ne vous soustrait pas à la justice (…) Personne ne se retrouve à répondre aux préoccupations du procureur spécial de la CRIET s’il n’y a pas à tout le moins des soupçons évidents contre cette personne ; et les enquêtes se poursuivent » avait déclaré l’ancien journaliste et militant de la démocratie durant les deux mandats du président Boni Yayi.
Il faut préciser que le vendredi 23 avril dernier, le secrétaire d’état américain, Anthony Blinken avait exprimé la préoccupation du gouvernement américain face à la vague d’arrestations qui frappe depuis quelques jours les dirigeant politiques de l’opposition au Bénin.
Approchée hier soir par rapport au silence qu’on observe à la Criet au sujet du dossier Joël Aïvo comparativement à celui de Madougou, une source proche du Parquet spécial a laissé entendre que :« La justice fait son travail sans aucune forme de pression.».
Par Christian AFFAME
Journal L’Afrique en Marche du lundi 26 avril 2021